Porté par des besoins de souveraineté, de maîtrise des solutions utilisées et de contrôle des coûts, l’open source n’est plus perçue comme un choix marginal par les organisations. À l’approche de l’Open Source Experience, organisé les 10 et 11 décembre à la Cité des Sciences et de l’Industrie à Paris, Fabrice Billard, responsable du pôle Architecture et DevOps chez Orange Business, décrypte les dynamiques actuelles autour de l’open source.
L’open source, longtemps choisi pour des raisons de coût et de partage, retrouve aujourd’hui une place centrale dans les choix technologiques des organisations. À ces usages historiques s’ajoutent désormais de nouvelles attentes. Mieux maîtriser les solutions déployées, disposer d’une transparence complète sur le code et conserver une vraie capacité de contrôle. Sur le terrain, cette évolution se traduit par une demande croissante, avec l’arrivée de nouveaux acteurs jusque-là peu intéressés par ces solutions.
On observe aujourd’hui un regain d’intérêt pour l’open source. Comment l’expliques-tu et quels signes concrets observes-tu sur le terrain ?
Il y a effectivement un regain d’intérêt, même si l’open source n’a rien d’un sujet récent. À l’époque, il était surtout choisi pour le coût et pour la logique de partage.
Aujourd’hui, les raisons ont évolué. La souveraineté prend une place importante, car les organisations souhaitent mieux maîtriser les solutions qu’elles utilisent et comprendre la façon dont elles sont construites. Le code ouvert apporte cette transparence. Il y a aussi la partie IA, et notamment l’IA générative. L’usage important de l’open source dans ce domaine renforce l’innovation, grâce au caractère collaboratif et au partage du code avec des communautés très avancées.
Sur le terrain, le changement est net. Là où nous proposions autrefois ces solutions, ce sont désormais les clients qui les demandent, y compris ceux qui n’en voulaient pas auparavant. Les évolutions réglementaires, comme NIS2, ainsi que la volonté de mieux maîtriser les coûts renforcent ce mouvement. L’open source est désormais perçu comme une option crédible parmi les solutions possibles.

Pourquoi Orange Business fait-il le choix d’intégrer l’open source dans son offre, et comment accompagnez-vous les entreprises qui souhaitent s’y ouvrir ?
Orange s’appuie sur l’open source pour plusieurs raisons. En tant qu’entreprise souveraine, elle doit pouvoir proposer des solutions ouvertes aux clients qui recherchent davantage de maîtrise, sans basculer entièrement sur ce modèle. Il y a aussi l’évolution de la demande. Les entreprises expriment de plus en plus clairement un intérêt pour ces technologies et il est logique pour Orange Business d’adapter son offre.
L’accompagnement passe d’abord par une phase de conseil afin de comprendre pourquoi une organisation souhaite quitter un éditeur ou se tourner vers l’open source. Vient ensuite un travail de comparaison entre différentes solutions, en évaluant notamment la solidité des communautés qui y contribuent, l’historique du projet ou encore la fréquence des évolutions du code. Ces éléments permettent d’apprécier la fiabilité et la capacité d’évolution de la solution.
Orange Business intervient également sur la gouvernance pour s’assurer que la solution restera adaptée dans le temps, puis sur l’intégration et le support. Celui-ci peut aller du niveau 1 au niveau 4, en fonction de la solution, ce dernier correspondant à la capacité de corriger directement le produit en tant que contributeur. L’objectif reste d’offrir au client un niveau de service constant tout au long du cycle de vie de la solution.
Tu présentes cette année le démonstrateur Data Rider au salon OSXP. De quoi s’agit-il et que montre-t-il concrètement de votre expertise dans l’open source ?
Data Rider est un démonstrateur ludique présenté sous la forme d’un petit circuit où deux voitures avancent grâce à des manettes. Le circuit est équipé de capteurs permettant de collecter de la donnée en continu, ensuite traitée avec des solutions open source. Une première partie porte sur la supervision, avec analyses et statistiques sur la course. Une seconde illustre l’intelligence artificielle, puisqu’une voiture peut être pilotée automatiquement et adapter sa vitesse aux caractéristiques du circuit.
[Data Rider] Booster Mario Kart à l’IoT et à l’IA – Étape 2 : la donnée en temps réel, du capteur au Dashboard
Lire la suiteCe démonstrateur a été créé parce qu’il est difficile de présenter notre savoir-faire en matière de traitement de données en temps réel et d’IA, pour des raisons de sécurité ou de confidentialité. Les solutions open source utilisées ici sont comparables à celles que nous déployons à grande échelle chez certains clients et reproduisent, à petite échelle, des mécanismes appliqués dans des environnements beaucoup plus importants.
La question de la confiance revient souvent lorsqu’il s’agit d’open source. Quelles sont les principales réticences et comment y répondez-vous ?
La confiance reste un sujet important. Les réticences sont souvent paradoxales. Certaines entreprises choisissent l’open source parce qu’elles peuvent voir le code et ont le sentiment de mieux maîtriser ce qu’elles utilisent, ce qui est plus fréquent chez celles qui en ont déjà l’habitude. D’autres ont moins confiance, car elles ont longtemps travaillé avec des éditeurs et associent encore la robustesse ou le support au modèle propriétaire. Pour elles, l’open source représente un changement qui doit être accompagné, et nous jouons alors ce rôle d’intermédiaire.
Pour créer cette réassurance, plusieurs critères sont examinés, comme le nombre de contributeurs, la fréquence des évolutions du code ou l’historique du projet. Lorsque c’est nécessaire, nous pouvons aussi contribuer nous-mêmes en mobilisant des développeurs pour corriger des anomalies et offrir un niveau de support équivalent à celui d’un éditeur.
Il subsiste aussi des idées reçues, notamment l’image d’un open source réservé aux “geeks” ou peu industrialisé avec l’image du développement dans un garage. Ce n’est plus la réalité. Ces solutions reposent aujourd’hui sur des pratiques professionnelles et permettent un passage à l’échelle comparable à celui des offres propriétaires.
Quelles sont, selon toi, les grandes tendances qui vont structurer l’avenir de l’open source dans les entreprises ?
Pour moi, l’open source part du bas, de l’infrastructure. Linux y est présent depuis longtemps, et presque tous les serveurs professionnels tournent aujourd’hui sous ce système. Au-dessus, les machines virtuelles restent très marquées par les éditeurs, même si les alternatives open source progressent. Plus on remonte vers l’utilisateur final, moins il existe de solutions ouvertes.
Le principal frein reste le côté parfois moins « user friendly », alors que les solutions éditeurs sont plus travaillées pour l’utilisateur final. Mais l’open source continue à remonter les couches et propose des alternatives crédibles, y compris en bureautique.
Dans les entreprises, il est déjà bien ancré sur l’infrastructure et la virtualisation. Il va continuer à gagner du terrain sans signifier la fin des éditeurs. La vraie différence, aujourd’hui, est que toutes les organisations se posent la question entre les deux modèles, alors que certaines ne l’envisageaient pas.
Enfin, il faut rappeler que les solutions ou produits développés en France ou en Europe ont un certain retard dû à des investissements moins massifs qu’en Amérique ou en Asie. L’open source permet parfois de rattraper ce retard.
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